Artiste plasticien à Toulouse

Texte envoyé par courrier le 3 mars 2010 à Nicole Belloubet (1ère adjointe au Maire de Toulouse, en charge de la Culture) et à Catherine Guien (21ème adjointe au Maire de Toulouse, en charge de l'Innovation).


1 - Constats
Vous le savez, pour les artistes plasticiens Toulousains, la première grande difficulté consiste à trouver un atelier pour travailler. De façon concomitante, selon la taille des œuvres, trouver un lieu de stockage adapté est souvent une gageure. Enfin, exposer et vendre à Toulouse est souvent un défi, quelle que soit la qualité du travail et la notoriété de l'artiste.
Ne nous cachons pas la réalité, le dynamisme de l'art contemporain Toulousain n'est pas des plus intenses, le marché est atone et le foisonnement de créations que nous espérons tous n'est pas aussi dynamique qu'il pourrait l'être.

Il me semble que pour répondre à ces besoins et pour générer ce foisonnement tant attendu, la création d'un pôle fort est un atout majeur et indispensable. Pour être viable et efficace, ce pôle doit être clairement identifié géographiquement et donc être regroupé en un lieu unique (Prison St Michel, La Cartoucherie ou Caserne Niel par exemple). Porteur d'un projet clair et lisible, il pourra ainsi offrir un rayonnement national et international à nos actions. Évidemment, il doit aussi se développer en concertation avec les artistes et les structures existantes et s'appuyer sur l'expertise et les compétences de celles-ci.

2 - Propositions
Je n'ai pas la prétention de définir ici, de façon exhaustive, ce que devrait être ce pôle, mais vous fait part de certaines fonctions qu'il pourrait remplir.

> Atelier / Stockage
Nous pourrions envisager un lieu regroupant un parc d'ateliers, accessibles par location aux artistes plasticiens professionnels. Pour définir cette offre, il est important de prendre en compte la spécificité du travail des artistes plasticiens, très différent de celui des artistes du spectacle vivant. Ces différences se traduisent tant dans l'équipement des ateliers (il n'y a pas de monte-charge aux ateliers de L'Imprimerie !!!), que dans leur modalité d'utilisation. Plusieurs modes de mise à disposition pourraient êtres envisagés :
- location longue durée pour mener un travail régulier ;
- location courte durée adapté au développement d'un projet particulier ;
- location longue durée de box de stockage ;
- mise à disposition d'un ou deux ateliers logement à destination d'artistes nationaux ou étranger en résidence à Toulouse (possibilité de partenariat avec les structures art contemporain de Toulouse : bbb, lieu commun …).

> Prestation de services
Contrairement aux acteurs du spectacle vivant, les acteurs des arts plastiques sont peu fédérés. Leur pratique est éminemment plus solitaire. Il s'en suit une moindre représentation dans la politique locale (la discrétion des artistes plasticiens lors des Assises de la culture a été flagrante) et une professionnalisation difficile. Les artistes qui ne sont pas représentés par un agent ou une galerie sont alors face une complexité administrative qui souvent les anéantit. Nous pouvons souhaiter une structure, à destination des artistes plasticiens, pour les seconder dans leurs démarches et besoins spécifiques : demande de subvention, communication, diffusion et prospection, organisation technique, administration et comptabilité, information législative, etc. Ce genre de structure, prestataire de service, existe pour le spectacle vivant et cela fonctionne parfaitement, de façon très compétente et professionnelle. Par contre, je n'en connais aucune en ce qui concerne le domaine des arts plastiques. Ce que j'évoque ici n'est pas une formation à destination des artistes pour apprendre à être autonome dans ces démarches (comme le propose notamment le bbb), mais bien de la délégation d'une prestation de service en faisant appel à des professionnels de ces métiers. Bien que cela soit ma réalité, mon ambition n'est pas d'être, en plus de mon travail d'artiste : administrateur, diffuseur, comptable, producteur, responsable communication, régisseur …

Pour exemple, je suis actuellement confronté aux problèmes d'organisation douanière et de transport pour une exposition hors CEE. N'ayant ni agent, ni galerie, s'offre à moi trois possibilités :
- être loin de mon activité artistique et tout apprendre sur le sujet pour devenir un véritable couteau suisse de l'art contemporain. C'est malheureusement ma solution actuelle, fortement insatisfaisante ;
- engager un administrateur permanent, comme le font les compagnies de spectacle vivant. Ce serait une bonne solution, mais la charge financière est encore trop lourde pour moi ;
- demander les services d'une structure tierce, compétente en la matière. Solution réaliste et satisfaisante qui fait l'objet de ce paragraphe, mais qui, à ma connaissance, n'existe pas.

Certes, il me semble que cette structure se doit d'être associative ou privée, plutôt qu'institutionnelle. Mais, s'il n'y a pas de proposition en ce sens, je comprends qu'il vous sera difficile d'agir pour l'encourager et la soutenir... Je souhaite que les formations du bbb suscitent de telles vocations.

> Marché de l'art
Dans cette dynamique de soutien à la création artistique contemporaine, le renforcement du marché de l'art est bien sûr primordial. Celui-ci n'est pas dissocié et indépendant des espaces d'expositions (associatifs et institutionnels) qui diffusent et produisent de l'art contemporain. Il convient de penser une globalité. Le marché doit être vitalisé par des acquisitions publiques et par le développement du marché privé. Des actions en faveurs des galeries et des collectionneurs sont aussi à envisager. Il pourrait s'agir, par exemple, de favoriser l'accès des "jeunes" artistes à ce marché, d'accompagner (inciter, informer) les nouveaux acheteurs dans leur première acquisition ou encore d'encourager l'installation de nouvelles galeries. Propositions à creuser.

> Artothèque
Qu'elle soit de nature associative ou municipale, je m'étonne qu'il n'y ait pas une artothèque à Toulouse ! De nombreuses villes, petites ou grandes, disposent d'une telle proposition : Bordeaux, Limoges, Angoulême, Poitiers, Grenoble, Mulhouse, Auxerre, Nantes, Caen, etc. Nous n'allons certes pas nous définir par rapport aux autres villes, mais cette absence est surprenante … En effet, les avantages d'une artothèque sont majeurs :
- offrir à tous la possibilité de rencontrer une œuvre d'art, au quotidien et de façon intime ;
- soutien à la création par des acquisitions et expositions ;
- susciter l'émergence de nouveaux collectionneurs privés.

> FRAC vs Centre d'Art Contemporain vs Musée d'art moderne et contemporain
Les manquements du FRAC sont flagrants. Le soutien à la création régionale est faible, la diffusion hors région de la collection est réduite et la lisibilité des orientations est très confuse. Il semble que la cause en revient au regroupement des FRAC, Centre d'Art Contemporain et Musée d'Art Moderne et Contemporain.
Je crois savoir que vous avez commencé à tirer les conclusions de cette "expérience". Il faudrait peut-être aller plus loin encore et donner un lieu et une direction propre à chacune de ces institutions. Nous y gagnerions certainement en efficacité, cohérence et lisibilité de chacun des projets. Un peu de concurrence et de diversité seraient peut-être les bienvenues …

> Printemps de Septembre
Le Printemps de Septembre est remarquable par sa qualité, son exigence, son envergure internationale, bref par son excellence. C'est un des événements majeurs pour l'art contemporain à Toulouse, de ceux qui sont aptes à dynamiser la création et à fédérer les acteurs ! De ce point de vue Rrose Sélavy, le "magazine des associations de galeries d'art contemporain", sorti à l'occasion de l'édition 2008 du Printemps de Septembre, en est un exemple remarquable. Je citerais aussi PinkPong, "réseau art contemporain de l'agglomération toulousaine", qui semble lui aussi découler de la dynamique structurante du Printemps de Septembre.
Méfions-nous, je pense que de nombreuses municipalités seraient très heureuses d'accueillir Le Printemps de Septembre et ce serait un échec très dommageable à notre ville que ce festival nous quitte par manque d'un soutien fort. Je milite ici auprès de vous pour le maintien et le renforcement de cet événement capital pour Toulouse !